Agé de 26 ans, Edouard Mendy est aujourd’hui titulaire indiscutable dans les buts du Stade de Reims. Du haut de son mètre 97, il survole le championnat de Dominos Ligue 2. Le club compte 15 points d’avance sur le troisième à 8 journées de la fin de la compétition et les prestations remarquables et remarquées de son gardien y sont pour beaucoup. Mais s’il est, à ce jour, en haut de l’affiche, il le doit à ses qualités bien sûr, mais aussi à sa persévérance tant son parcours ne fut pas un long fleuve tranquille. En exclusivité pour Main Opposée, il revient sur son début de carrière.
Main Opposée : Bonjour Edouard, à quel âge as-tu commencé à jouer dans les buts ? Pourquoi avoir choisi ce poste ?
Edouard Mendy : J’ai commencé à jouer au foot à l’âge de 7-8 ans. Puis un jour où notre gardien habituel était absent, comme j’étais le plus grand, notre coach m’a choisi pour le remplacer. Ce jour là j’ai tout arrêté et l’entraîneur voulait que je continue dans les buts, mais moi, ce qui m’intéressait, c’était de jouer sur le terrain ! Alors on a trouvé un deal : je commençais dans les buts, puis je laissais les gants pour continuer sur le champ quand le score était acquis. J’ai continué ainsi jusqu’à ce que le club du Havre s’intéresse à moi lorsque j’avais 12 ans.
MO : Tu files donc au centre de formation du Havre. Comment se passent ces années ? Quels gardiens et quels entraîneurs y côtoies-tu ?
ÉM : Quand j’arrive en U13, je suis avec Brice Samba, Romain Lejeune, puis quelques temps après arrive Zachary Boucher. Notre entraîneur est Michel Courel, c’est lui qui a déjà formé par le passé des gardiens comme Steve Mandanda, Nicolas Douchez, Olivier Blondel, Carlos Kaméni…Trois années passent, puis à l’âge de 16 ans, je suis 3ème dans la hiérarchie derrière Zachary Boucher, qui explose tout, et Brice Samba. Pour moi il est inconcevable de ne pas jouer, alors je décide de signer dans un club amateur, les municipaux du Havre, qui avait toutes ses équipes en catégories nationales ou DH.
MO : Tu quittes donc le centre de formation pour un club amateur afin de trouver davantage de temps de jeu ?
ÉM : Oui, c’est ça. En fait, je continuais à m’entraîner avec le centre du Havre et je jouais le week-end avec les municipaux, ce qui permettait aussi au HAC de garder un oeil sur moi. J’ai travaillé doublement tous les jours pendant 3 années entre les entraînements au centre et ceux avec l’équipe des municipaux. J’étais sur-motivé, je savais que c’était primordial pour moi si je voulais espérer percer au plus haut niveau.
MO : Quelles sont les différences au quotidien ? Regrettes-tu ton choix ?
ÉM : Il y avait évidemment moins de pression sur les joueurs et surtout moins de rigueur. Au centre, on ne se focalise que sur le foot et les études, on ne connaît pas les tracas des joueurs amateurs qui travaillent. Aux municipaux, les entraînements étaient aussi très intéressants. Les coachs étaient très compétents, ils avaient des diplômes mais forcément, ils ne pouvaient pas exiger de joueurs amateurs le même investissement que des jeunes d’un centre de formation. Quand il faisait froid par exemple, on était moins à l’entraînement et les excuses étaient celles que tous les joueurs amateurs connaissent !!! (rires) Je me souviens aussi qu’on s’entrainait sur un synthétique très très abîmé, pour rester poli… Mais je n’ai jamais regretté ce choix car j’étais revanchard de ne pas avoir totalement réussi au centre, cela a vraiment forgé mon caractère, surtout au début. J’avais 16 ans et je jouais avec des garçons plus âgés. Il fallait que je montre mes compétences, que je m’impose et du coup, j’ai mûri beaucoup plus rapidement. Mon grand gabarit a facilité mon intégration, car eux pensaient que j’étais plus vieux. Cette période a été un moment charnière de ma jeune carrière.
MO : Tu quittes alors ce club amateur des municipaux pour Cherbourg, un club de national. Comment cela se passe -t-il ?
ÉM : Karim Boukraa, un ancien joueur pro qui travaillait aux municipaux, me met en relation avec les dirigeants de Cherbourg. Il estimait que je m’enterrais en DH et que j’avais les qualités pour jouer au dessus. Il m’a dit : ” Si tu veux encore espérer une carrière professionnelle, c’est maintenant ou jamais ! Fonce !!! “. Après 3 jours d’essais positifs, je signe au mois d’août comme troisième gardien. Le titulaire est Simon Lugier (aujourd’hui à Saint-Malo) et moi je deviens vite doublure. Je suis sur le banc en national le vendredi, puis je joue en équipe B le samedi ou dimanche. Là encore, c’est niveau DH, mais je m’entraîne toute la semaine avec des joueurs de National alors je progresse rapidement. Du coup, je finis la deuxième année en tant que titulaire, puis j’enchaîne toute la saison suivante en CFA après notre rétrogradation.
MO : Pour un gardien, y a-t-il une différence entre le centre de formation et le championnat National ?
ÉM : C’est vraiment différent. Le centre, c’est l’école. On nous apprend les bases techniques, les bons gestes aux bons moments. En National, c’est beaucoup plus exigeant. C’est vraiment l’efficacité qui prime. On faisait toujours des exercices de coordination bien sûr, mais de façon beaucoup plus puissante. On ne devait plus forcément garder le ballon, mais plutôt apprendre à le dégager au loin sur les côtés pour éloigner le danger.
MO : Le club de Cherbourg vit alors des heures difficiles avec une descente administrative. Toi aussi en enchaînant avec une saison blanche…
ÉM : C’est vrai. Après mes bonnes saisons dans la Manche, je voulais continuer sur ma lancée. J’étais très intéressé par le championnat Anglais, et un agent de confiance, qui travaillait avec Le Havre, m’avait promis un contrat dans un club de League One. Malheureusement, le 30 août, il m’envoie un SMS pour me dire que cela ne se fera pas. Je me retrouve sans club et vraiment dans la galère… En effet, croyant signer outre-manche, j’avais refusé plusieurs offres françaises, essentiellement en National. Cet agent me replace alors au centre de formation du HAC le temps de me trouver un club. Là je prends un véritable coup sur la tête, car à 22 ans, je me retrouve sans compétition et à m’entraîner avec des gardiens 4-5 ans plus jeunes que moi. Le point positif est que je retrouvais Michel Courel qui croyait encore en moi et qui m’a fait énormément travailler. Il a été un atout psychologique très important car il m’a valorisé et il m’a convaincu que si je continuais à persévérer, malgré une année sans temps de jeu, cela allait forcément payer un jour.
MO : Michel Courel avait vu juste car après cette année sans jouer, tu signes à Marseille. Que retiens-tu de cette expérience Olympienne ?
ÉM : En effet, j’ai l’opportunité de signer à l’OM et là-bas, je change littéralement d’univers !!! Je passe du centre de formation Havrais à des entraînements quotidiens avec Steve Mandanda, Yohann Pelé et le coach Stéphane Cassard. J’arrive comme 3eme gardien bis, la semaine je suis avec le groupe pro puis, le weekend, je joue en CFA un match sur deux avec Florian Escales. Steve Mandanda me donnait quelques conseils importants, mais j’ai surtout beaucoup appris en l’observant, que ce soit en match ou à l’entraînement et j’ai énormément progressé dans mon jeu au pied à cette période. Avec Yohann Pelé, on avait le même gabarit et du coup, un peu les mêmes qualités et les mêmes points à perfectionner. Il m’a aidé en m’apportant son expérience, il ne voulait pas que je fasse les mêmes “erreurs” que lui. Il pensait que j’avais beaucoup de qualités et que je ne devais pas rester 3ème gardien dans un club de Ligue 1 et jouer en CFA. Pour lui, je devais plutôt tenter ma chance en Ligue 2, même comme doublure, et surtout être en concurrence pour espérer devenir titulaire. Puis, si j’étais performant, revenir ensuite en Ligue 1. Stéphane Cassard, lui, était tiraillé. Il aimait travailler avec moi et voulait continuer à me faire progresser, mais il voulait aussi que je joue davantage. En Ligue 2 si possible.
MO : Est-ce un échec ou une déception pour toi de ne pas avoir percé à Marseille ?
ÉM : Non, car dans mon idée de départ Marseille était un tremplin pour mon évolution. Je venais là pour une saison dans le but de tirer profit au maximum de toute la qualité qu’il y avait ici. Je suis arrivé une semaine après le départ de Bielsa. C’était une année difficile avec Michel puis Passi comme coachs, une treizième place et des supporters mécontents qui venaient parfois montrer leur colère au centre d’entraînement. J’ai bien eu la possibilité de signer un contrat mais l’ambiance générale était maussade, je n’étais pas du tout leur priorité et je n’avais pas le temps d’attendre.
MO : Tu rebondis alors à Reims, en Ligue 2. Comment se passe la concurrence avec Johan Carrasso ?
ÉM : Quand je suis arrivé, il était titulaire mais il n’y avait aucune animosité entre nous. On se tirait la bourre sainement tous les deux, sans coups tordus, et il m’a souvent dit qu’il appréciait cette relation. Je pense qu’elle contribuait aussi à nos bons résultats défensifs. Cette saison, la hiérarchie s’est inversée mais il a un comportement exemplaire avec moi. Lors d’événements spéciaux, par exemple un match devant ma famille au Havre où je peux vouloir surjouer ou trop en faire, il a les bons mots et les bonnes attitudes pour que je reste calme et que j’exprime au mieux mes capacités sur le terrain
MO : Comment a évolué cette hiérarchie jusqu’à s’inverser ?
ÉM : Le nouveau coach voulait attendre la fin des matchs de préparation avant de faire son choix définitif, mais Johan s’est blessé. J’ai donc joué le dernier match amical, puis j’ai enchaîné en championnat. J’ai saisi ma chance, j’ai fait de bonnes prestations et ce changement de statut s’est donc fait tout naturellement, peut-être aidé par nos bons résultats. L´ambiance est parfaite quelque soit notre place de numéro un ou numéro deux.
MO : Tu as percé sur le tard. Quels conseils pourrais-tu donner pour réussir ?
ÉM : En premier lieu, il faut croire en soi, en ses possibilités, se fixer des objectifs et beaucoup travailler pour les atteindre sans jamais baisser les bras. Si on vous dit que vous êtes inférieur à un autre gardien, vous devez travailler doublement pour prouver que vous êtes à son niveau, voire supérieur. Il faut aussi un bon entourage. Ma famille m’a toujours soutenu et encouragé. Mes potes de jeunesse aussi. Quand ils me disaient que j’étais la fierté du quartier, ça m’a donné des ailes et des forces pour continuer. Je pense aussi que d’avoir été au centre du Havre, dans la ville de mes parents, a été bénéfique pour moi. Loin de ma famille, je ne sais pas si j’aurais réussi à me libérer et à m’épanouir autant.
MO : Abordes-tu les matchs de ligue 2 comme ceux de DH ?
ÉM : Oui, j’aborde toujours tous les matchs avec la même concentration. Que ce soit en DH, National ou ligue 2, mon seul objectif est de ne pas prendre de but. Nous, gardiens, sommes “le dernier rempart”, et à n’importe quel niveau on peut encaisser un but si on n’est pas assez sérieux ou rigoureux.
MO : Quels sont tes rituels ou habitudes d’avant-match ?
ÉM : J’aime discuter avec mes coéquipiers dans le vestiaire. Je veux que ce qu’on a mis en place, du point de vue tactique ou coups de pieds arrêtés, soit clair et net. Par exemple, si je décide de jouer long en début de rencontre, c’est pas la peine de décrocher pour demander le ballon. Au contraire, si je relance court, je leur demande de déclencher l’appel dès que je suis en possession du ballon. Dans les deux cas, on gagne quelques secondes précieuses pour la mise en place de nos actions de jeu. Je suis donc conditionné et cela m’aide à rentrer directement dans mon match.
MO : Tu es très grand, 1m97. Quels sont les avantages et les points faibles de cette grande taille ?
ÉM : Évidemment c’est un avantage dans les duels. Dans les un contre un, je suis plus imposant et je prends plus de place. En couvrant davantage d’espace, ça laisse moins d’angles de tirs pour l’attaquant. Dans le jeu aérien c’est aussi favorable, mais seulement si on y joint l’engagement et une grosse envie de tout exploser. Cela soulage nos défenseurs et perturbe les intentions des adversaires. Et même si l’on va moins vite au sol qu’un gardien plus petit, on va aussi chercher le ballon plus loin. Il faut donc insister sur le travail de tonicité pour être plus performant sur les ballons proches de nos jambes.
MO : Que penses-tu des buts encaissés par Thibault Courtois face à Barcelone en quart de finale de Ligue des champions ?
ÉM : Voilà l’exemple typique de ce que je viens de te dire. Évidemment il aurait dû mieux faire, mais pour moi ce n’est pas une erreur au sens propre du terme. Messi peut mettre le ballon où il veut et a su tirer profit au maximum de cette faille. Mais si l’on trouve normal qu’il arrête une frappe en lucarne, en bonifiant sa grande taille là où un gardien plus petit serait trop court, alors on ne peut pas dire que c’est une grosse erreur quand il encaisse un tel but ! Nous avons tous des points forts et des plus faibles. Certains joueurs, comme Messi, savent parfaitement en profiter.
MO : Et toi, dans quels domaines aimerais tu encore progresser ?
ÉM : Franchement, je veux progresser partout et je me donne les moyens pour y arriver. Que ce soit au sol, dans les duels, dans le jeu au pied ou aérien. Je travaille aussi beaucoup ma tonicité, car avec la force que j’ai dans les jambes, j’ai encore une marge de progression à atteindre. Je dois aussi continuer à bien lire le jeu et analyser nos temps forts et nos temps faibles. Le coach compte sur moi pour donner du rythme aux rencontres afin de mettre la pression sur nos adversaires qui, souvent, nous attendent dans leur camp. Il y a une philosophie de jeu bien précise et le gardien y a une importance capitale. C’est pourquoi j’essaie d’être performant dans les petits jeux de conservation à l’entraînement. Je pense qu’en me voyant a l’aise avec le ballon dans les pieds, mes coéquipiers auront une plus grande confiance en moi et joueront plus détendus en match.
MO : Comme travailles-tu ta tonicité ?
ÉM : Pour être tonique, explosif et puissant, on travaille beaucoup avec des cordes élastiques. On va chercher le ballon, on revient en arrière on repart etc… On force beaucoup car l’élastique nous retient. On fait aussi beaucoup d’exercices répétitifs avec des poids, puis des séances de renforcement musculaire en salle avec des préparateurs spécialisés pour optimiser ce secteur.
MO : Cette vivacité est aussi importante pour les penalties où tu excelles. Quel est ton secret ?
ÉM : Plus jeune, je fonctionnais plutôt au feeling. Mais depuis que je suis à Reims, on utilise la vidéo avec Sébastien Hamel. Il me fait un montage sur les tireurs des équipes qu’on rencontre et l’on remarque plein de choses. Cela me donne des indications précises, et même si je ne les arrête pas tous, à chaque fois je pars du bon côté. La plupart des joueurs ont leurs habitudes et tirent au même endroit ou alors changent suivant le moment de la rencontre. Par exemple, plus le match avance et la fatigue avec, plus la frappe sera croisée. Avec Sébastien, toujours dans l’optique d’être encore plus décisif, on accentue le travail sur le timing. Je dois partir le plus tard possible au moment de la frappe, sans donner d’indications sur le côté où j’ai décidé de jaillir.
MO : Pourquoi est-ce si important pour toi d’échanger avec tes défenseurs ?
EM : J’estime qu’avec notre position géographique sur le terrain, on voit tout le jeu et on se doit de donner des indications de placements à nos défenseurs. Pour être un bloc difficile à percer. C’est quelque chose que je fais depuis tout petit et de façon innée, on ne m’a jamais demandé de le faire. J’essaie d’avoir une communication courte mais simple et précise. Notre système de jeu implique que je sois le premier relanceur, alors je dois être calé avec ma défense et cela passe forcément par une bonne communication.
MO : Tu es très important pour l’équipe sur le terrain. Quand est-il en dehors ?
EM : C’est année le coach compte sur moi, il a fait de moi un des trois ou quatre cadres de l’équipe. J’essaie de veiller à ce qu’il règne une bonne ambiance dans le vestiaire. Nous sommes premiers alors tout va bien, mais il ne faut pas oublier ceux qui jouent moins. J’ai toujours un mot positif pour eux, pour qu’ils restent concernés et qu’ils n’oublient pas qu’on doit être un groupe soudé. Et puis, après les victoires, je n’hésite pas à lancer les chansons et les cris de ralliements.
MO : Tu réalises une excellente saison à tous les niveaux. As-tu des garanties quant à ton avenir en temps que titulaire à Reims ?
EM : Non, pas de certitude pour la saison prochaine, mais c’est normal. J’ai prolongé mon contrat en janvier dernier jusqu’en juin 2020. Je suis satisfait de ma saison, mais je sais que je dois continuer à performer. Et si un autre gardien arrive, ça ne me fait pas peur. Je continuerai à me battre comme cette année pour rester le numéro un.
MO : Quel est ton point de vue sur le nombre de défenseurs aux poteaux sur les corners ?
EM : En concertation avec le staff et les autres gardiens, je ne mets personne aux poteaux. Je place un joueur à l’angle des six mètres qui sort pour intervenir si le corner est tiré “à la Rémoise”. Puis il y a notre capitaine, qui reste en zone, et deux lignes de trois : une au niveau des six mètres et l’autre entre le point de penalty et les six mètres. Si le corner est tiré au premier poteau, un défenseur de la deuxième ligne file pour couvrir le second poteau. Pour moi la zone est moins floue et cela me permet d’intervenir dans les airs plus facilement. Cette tactique est efficace puisqu’on a encaissé que deux buts sur corner ou coup franc en 29 matchs.
MO : Reims a en effet la meilleure défense du championnat. Est-ce un challenge supplémentaire ou totalement anecdotique pour toi ?
EM : Evidemment, en tant que gardien, c’est un challenge intéressant que j’aimerais réussir mais je sais aussi que nous avons des adversaires qui peuvent bien jouer et mériter marquer contre nous. Par contre, si on ne finit pas meilleur défense à cause de buts évitables, je serai très frustré et déçu.
MO : Es-tu toujours intéressé par le championnat Anglais ou alors par d’autres pays ?
EM : Oui. En dehors du championnat Français, il n’y a que l’Angleterre qui m’attire. Plus jeune, j’étais allé voir un match à Brighton avec une association et depuis ce jour, je rêve d’y jouer. C’est magnifique l’engouement que le football suscite dans ce pays avec les supporters, les gens dans la rue. Et puis il y a de très bons joueurs, un bon niveau avec énormément d’engagement. C’est vrai que les gardiens y sont peut-être moins protégés par l’arbitrage, mais je trouve ça intéressant. Il faut savoir mettre le bleu de chauffe et foncer. Cela me tente vraiment. On demande les mêmes qualités qu’en France en accentuant sans doute sur le jeu aérien, et ma grande taille serait un atout pour moi.
MO : L’expérience malheureuse de Steve Mandanda à Crystal Palace ne te refroidit pas ?
EM : C’est vrai que de voir un gardien avec autant de qualités ne pas réussir là-bas peut faire réfléchir. Je me suis déjà dit : “Pourquoi moi j’y arriverai et pas lui ?” Mais je pense qu’il y a beaucoup de paramètres à prendre en compte. Il n’est pas arrivé dès le début de la préparation, il s’est blessé, puis il y a eu un changement d’entraîneur. Ensuite, il s’est imposé mais les blessures l’ont pénalisé. Et puis je pense que l’environnement compte aussi, après tant d’années sous le climat méditérranéen, l’Angleterre ça peut perturber…De ce côté la je serai moins dépaysé !!! (rires)
MO : Que penses-tu de la liste des gardiens choisie par Didier Deschamps pour la coupe du monde ?
EM : Franchement, j’aurais choisi les mêmes. Hugo Lloris est capitaine à Tottenham et il est très bon. De même pour Mandanda à Marseille. Alphonse Aréola s’est imposé à Paris et a réalisé de bonnes prestations en Ligue des champions, donc sa sélection est logique. Costil ne réalise pas la saison qu’il espérait en signant à Bordeaux et Ruffier ne veut pas y aller! D’ailleurs, j’apprécie beaucoup sa franchise. Il vaut mieux refuser la convocation plutôt que d’accepter et de faire la gueule. Derrière ces cinq là, Benjamin Lecomte est de mieux en mieux, mais il ne joue pas l’Europe et c’est un handicap pour lui.
MO : Quels sont les gardiens que tu apprécies ?
EM : J’aime beaucoup Buffon, De Gea, Neuer et Mandanda. Neuer est le plus complet et le meilleur pour moi. Mandanda, que j’ai côtoyé au quotidien, m’a vraiment impressionné surtout dans son jeu au pied. Il participait souvent aux petits jeux réduits sur le terrain avec les joueurs, et il était au niveau ! Je trouve De Gea excellent sur sa ligne avec des réflexes incroyables. Et puis je suis bluffé par la longévité de Buffon, par sa capacité d’adaptation à l’évolution du rôle de gardien, surtout dans les relances. Bien sûr, il n’a pas les statistiques de Neuer ou Ederson dans ce secteur, mais il a beaucoup progressé et, depuis 3-4 ans, il repart davantage avec ses défenseurs ou ses milieux.
MO : Tu as la double nationalité, quelle sélection t’intéresse : le Sénégal ou la Guinée ?
EM : Je souhaiterais jouer pour le Sénégal. Pour l’instant, le titulaire c’est Khadim N’diaye, qui joue dans le championnat de Guinée. C’est lui qui a joué la phase de qualification pour la coupe du monde, car Abdoulaye Diallo et Alfred Gomis ne jouent pas dans leurs clubs respectifs, Rennes et SPAL en Italie. Le sélectionneur fait aussi parfois appel à Clément Diop qui joue en MLS. Évidemment ce serait un rêve d’aller au Mondial, mais même si j’ai déjà eu quelques contacts avec le staff Sénégalais, je n’ai jamais eu de convocation.
MO : Quels sont tes loisirs en dehors du football ?
EM : Je suis assez casanier. Je sors quelques fois au cinéma ou au bowling avec l’équipe, mais la plupart du temps je reste en famille. J’ai deux enfants et donc beaucoup d’occupations au quotidien entre les jeux, les promenades et tout le reste.
MO : Quel est ton plus beau souvenir ?
EM : Cet été, nous avons joué contre le Real Madrid lors du trophée Santiago Bernabeu en hommage à Raymond Kopa, qui a connu les deux clubs. C’était dingue, il y avait toutes les stars du Real, à part Cristiano Ronaldo et Benzema. Ils avaient gagné la Ligue des champions et présentaient la coupe aux supporters dans un stade plein. L’ambiance était incroyable et reste un souvenir inoubliable pour moi.
MO : Ton plus mauvais souvenir ?
EM : Sans hésiter, mon année de chômage.
MO : Ton plus bel arrêt ?
EM : Cette année , en janvier, contre Orléans. Je dévie une frappe sur la barre à 0-0 et dans la foulée, on marque… Ce n’est peut être pas le plus beau, mais il a été très important car il a contribué à repartir avec une victoire après la trêve.
MO : Le gardien contre qui tu as joué et qui t’as le plus impressionné ?
EM : Forcément un gardien de Ligue 2. C’est Paul Bernardoni, il est très fort mentalement malgré son jeune âge.
MO : Un dernier mot pour les lecteurs de MO ?
EM : Aux plus jeunes, je dirais qu’il faut toujours garder foi en ses rêves, ses objectifs. Il faut se donner les moyens d’y arriver, toujours travailler et ne jamais abandonner.
—–
Toute l’équipe de Main Opposée remercie Edouard Mendy pour sa gentillesse, sa bonne humeur et lui souhaite le meilleur pour la fin de saison. Avec une montée en Ligue 1 à la clé.
Photo de couverture : Jean-Claude Sikorsynski.