Dans cette nouvelle série sur Main Opposée, nous partons à la recherche du Saint-Graal. Celui qui transcende l’homme, qui abasourdit le spectateur et fait frissonner le portier. Vous l’aurez compris, nous cherchons l’arrêt parfait. Une quête présomptueuse, mais une quête que nous poursuivrons sans relâche, car elle mène à notre paradis. Si l’homme cherche un sens à son existence, nous chercherons ici plus encore. Nous cherchons le surhumain, le divin, celui qui nous fera même croire aux beautés de l’enfer et aux horreurs du paradis. Une quête impossible sûrement, mais nous, portiers, domptons l’impossible. Et qui d’autre qu’un portier pour incarner la perfection que nous cherchons tous à atteindre ?
Dans la constellation des gardiens, Handanovic demeure une étoile particulière. Voyez-vous, Handanovic, c’est une entité indescriptible. Il est là depuis toujours, mais ne cesse de vous impressionner. Aussi serein que la terre elle-même, d’une régularité irréprochable, Samir est sûrement l’un des gardiens les plus sous-côtés de ces dernières années. Néanmoins, par moment, Samir vient à vous, comme un séisme secouant sèchement toute la planète football. Et il laisse derrière lui cette aura destructrice, comme pour se venger de toutes ces années où tout le monde lui marcha dessus sans jamais le regarder. Définir Handanovic, c’est difficile, tant le portier de l’Inter est polyvalent. Néanmoins, il existe des arrêts du slovène que l’on ne saurait ne pas apprécier, tant ils sont représentatifs du talent d’Handanovic. Celui ci est l’un d’eux.
De n’importe quel arrêt réflexe se dégage une profonde complexité, comme si le temps devenait trop exigu et le portier trop exceptionnel. Un paradoxe entre un portier défiant le temps et un certain ralentissement de ce dernier. Incompréhensible, le spectateur se retrouve alors face à un spectacle ahuri. Ce ballon catapulté à toute vitesse par l’attaquant, se dirigeant inexorablement vers les filets, tout cela va bien trop vite. En l’espace d’un instant, tout est confus, si ce n’est ce but presque inévitable. Et puis, là, soudain, d’un chaos général surgit la lumière du portier. Resplendissante, elle calme tout. Eblouissante, elle luit partout. Assourdissante, elle englobe tout. Se dégage alors justement une hésitation, comme si le temps ne savait s’il devait accélérer ou ralentir. Le portier saute alors sur l’occasion et sur ce ballon qui s’abat sur ses buts.
Admirer l’arrêt d’Handanovic, c’est ici plus qu’un simple exercice. Il faut plusieurs tentatives afin de cerner cette parade. Plus qu’un réflexe, c’est tout un travail qui surgit en un instant. Des centaines de ballons semblables, répétés encore et encore, afin qu’arrivé à ce moment précis, Handanovic triomphe, car le Slovène ne semblait qu’attendre cet imprévisible assaut. Tout ici semble répété, et c’est là le comble pour un arrêt réflexe. Surtout, là où Handanovic impressionne, c’est sur cette main ferme qui s’oppose avec violence à la puissante tête de l’incrédule Dzeko. Telle une raquette de tennis, la main de Samir arrête puis réoriente le ballon. Dans cet élan de réactivité, le portier de l’Inter trouve la clarté d’esprit de repousser intelligemment ce ballon si difficile. Comment ne pas s’incliner face à la beauté du génie ?
Car si cet arrêt est beau, il en devient magnifique par le calme intransigeant de Samir Handanovic. D’une main de fer, le portier désamorce la bombe qui lui était jetée. Souvent, l’arrêt réflexe se traduit par une incompréhensible situation où le ballon sort miraculeusement. De par son talent, le gardien de l’Inter est resté lucide à tout instant. D’un calme éreintant pour l’adversaire, le gardien se sublime. Comment ne pas apprécier la sérénité de l’homme qui passait sa vie à s’entraîner au miracle ? De la perfection du réflexe, aussi calme que soudain, aussi certain qu’inattendu.
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