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11 September 2018


Nouvelle saison, nouvelle série, Main Opposée vous propose de revenir chaque mardi sur la carrière de légendes et artistes du poste de gardien. Aujourd’hui, le plus célèbre des gardiens grecs : Antonios Nikopolidis.

Quel est le point commun entre Achille, Hercule et Ulysse ? Tous trois sont des héros légendaires dont leurs exploits chantent les louanges de la Grèce. En 2004, un autre grec, les cheveux grisonnants, muni de ses gants et répondant au nom de Nikopolidis est parvenu à gravir l’Olympe européen à la barbe de grandes nations du football continental. Ce portier fut érigé au rang de gloire nationale en compagnie de ses coéquipiers au terme d’une odyssée en terre lusitanienne pour le moins légendaire.

Les débuts de « George Clooney », une légende verte

Le jeune Antonios débute sa carrière en 1985 dans le modeste club de sa ville natale, l’Anagessis Arta évoluant en Troisième division grecque. Il y restera jusqu’en 1989 avant de signer au Panathinaïkos, l’un des deux plus grands clubs de Grèce. Âgé de 19 ans, il intègre le groupe professionnel en 1989 en tant que numéro 2. Pendant neuf saisons, il se contente d’un rôle de gardien remplaçant, derrière le portier Polonais Jozef Wandzik notamment. C’est finalement en 1998, lors de sa neuvième saison avec le club athénien, que Nikopolidis devient titulaire. Le natif d’Arta multiplie les bonnes prestations au sein de l’élite grecque, prestations qui ne passent pas inaperçues aux yeux du sélectionneur grec de l’époque, Vassilis Daniil. Ce dernier offre à Antonios sa première sélection en août 1999 lors d’une rencontre amicale face au Salvador remportée 3 buts à 1 par les Hellènes. À présent titulaire indiscutable chez les “Beaux pirates“, surnom de la sélection grecque, Nikopolidis acquiert un nouveau statut.

Nikopolidis au Panathinaïkos - photo : Panini
Nikopolidis au Panathinaïkos – photo : Panini

En tant que gardien numéro 1, Nikopolidis ne remporte pas le moindre titre national, lui qui avait glané 4 fois le championnat et la coupe de Grèce en tant que portier numéro 2. Avec ses partenaires du Pana, Nikopolidis se heurte au rival historique : l’Olympiakos le Pirée, champion de Grèce sans interruption entre 1997 et 2003. À l’aube de la saison 2003-2004, le club athénien compte bien enfin détrôner le club du Pirée avec l’arrivée du coach israélien Itzhak Shum. Nikopolidis ne le sait pas encore mais cette saison va être inoubliable. 2004, pour le meilleur et pour le pire.

Le miracle de l’Euro

La sélection grecque emmenée par le sélectionneur allemand Otto Rehagel retrouve les joutes d’une compétition internationale, ce qui n’était plus arrivée pour la sélection grecque depuis le mondial américain en 1994. Nikopolidis connaît lui sa première grande compétition internationale alors qu’il  est dans une situation difficile en club. En effet, le dernier rempart des Tryffili – les trèfles – ne fait plus partie du groupe professionnel depuis février 2004, date à laquelle les dirigeants du Panathinaikos rompent les négociations concernant la prolongation de son contrat. Les supporters du Pana ne comprennent pas le comportement du président Vardinogiannis et défendent alors leur joueur. Malgré son inactivité forcée, le sélectionneur allemand renouvelle sa confiance à son gardien. Bien lui en a pris.

Les Grecs héritent d’une poule compliquée avec la présence de la Russie, de l’Espagne et du Portugal, pays hôte. Nikopolidis débute la compétition lors du match d’ouverture face aux Portugais galvanisés par le soutien de tout un pays. Emmené par Figo, Pauleta, Rui Costa ou le jeune Cristiano Ronaldo, le Portugal est logiquement favori, mais stupeur à Porto, les Grecs s’imposent à la surprise générale deux buts à un. Nikopolidis et ses partenaires parviennent à finir deuxième, devançant l’Espagne à la différence de buts. La Grèce est en quart de finale.

En quart de finale, Nikopolidis et ses partenaires héritent une nouvelle fois du rôle de petit poucet face aux tenants du titre français. Nikopolidis dirige sa défense d’une main de maître tel Léonidas, chef des Spartiates. Otto Rehhagel s’appuie sur une défense à trois dans l’axe pour contrecarrer les offensives françaises, et miracle se produit une nouvelle fois : les Grecs l’emportent d’un but de la tête de Charisteas.

Tout au long de la compétition, la défense grecque va être l’arme maîtresse du jeu prôné par Otto Rehhagel. En demi-finale, le coach allemand reconduit son système à 5 défenseurs pour tenir face aux offensives tchèques des Rosicky, Nedved, Baros ou Koller. Les Tchèques butent une nouvelle fois sur une défense grecque imperméable renforcée par une belle prestation de Nikopolidis. Le dernier rempart des Hellènes repousse deux tirs de Jankulovski aux 6ème et 33ème minutes et s’interpose à la 32ème devant Nedved qui avait pris de vitesse la défense grecque. Score nul et vierge à la fin du temps réglementaire et c’est un but de Dellas à la 105ème minute de jeu qui offre à la Grèce une qualification historique en finale de l’Euro 2004.

Pour ce dernier acte, les Grecs retrouvent le Portugal bien décidé à remporter le premier titre de son histoire à domicile. Mais ce soir-là, tout un peuple va assister à l’un des plus gros braquages de l’histoire du football moderne. Complètement dominés dans le jeu par les Portugais, les Grecs parviennent à ouvrir le score à la 56ème minute par l’intermédiaire de Charisteas à la suite d’un corner. Ce but est le seul tir cadré des coéquipiers de Nikopolidis lors de cette finale.
Bien protégé par la rigueur tactique des ses défenseurs digne des hoplites, Nikopolidis n’est que très peu inquiété. En effet, le gardien grec repousse difficilement deux tentatives portugaises aux 59ème et 63ème minutes de jeu . Acculé par les offensives lusitaniennes, Nikopolidis soulage ses coéquipiers en s’avérant décisif lors d’un face à face avec Cristiano Ronaldo à la 74ème minute de jeu.

 

Les cages de Nikopolidis restent inviolées jusqu’au coup de sifflet final, la Grèce réalise le plus grand exploit du football moderne. Réalisant 3 cleansheet lors des matchs à élimination directe face au gotha du football européen, Antonios fait partie de l’équipe type de la compétition.

Antonios Nikopolidis vainqueur de l’Euro 2004 - photo : fanpop.com
Antonios Nikopolidis vainqueur de l’Euro 2004 – photo : fanpop.com

Du Pana à l’Olympiakos

Avant l’Euro 2004, Nikopolidis décide de s’occuper de son avenir. Écarté de son équipe par les dirigeants du Panathinaikos, Antonios va se venger des dirigeants des verts en signant chez le rival historique : l’Olympiakos. Une trahison pour les fans des “Tryffilli” qui ne pardonneront jamais cet affront à Nikopolidis, lui qui avait passé 14 saisons dans leur club favori. Il est hué par la foule lors des célébrations du doublé 2003-2004.
Avec les “Erythrolefoi” – les rouge et blanc –, Nikopolidis va s’imposer comme le meilleur dernier rempart du championnat Grec et va immédiatement entrer dans le cœur de ses nouveaux supporters en préservant sa cage inviolée lors de son premier derby face au Pana. Avec l’Olympiakos, Nikopolidis domine la scène nationale entre 2005 et 2009 avec 10 trophées. Ses prestations et sa ressemblance avec George Clooney le rendent très populaire dans tout le territoire hellène hormis au Pana où Nikopolidis est personne non gratta.

2006-2011 : La fin d’une légende

À l’Olympiakos, Nikopolidis acquiert une réputation de gardien décisif avec des arrêts « game-winning » lors des rencontres les plus importantes. De plus, le gardien grec s’illustre sur la scène nationale avec son club en stoppant 3 penalties en ligue des champions face à la Roma, Rosenborg et le Real Madrid. Son habilité dans cet exercice se traduit dans les chiffres lors de la saison 2007-2008 durant laquelle le dernier rempart de l’Olympiakos bat le record de penalties stoppés en une saison dans le championnat grec.

En sélection nationale, Nikopolidis et ses partenaires sont devancés dans la course au barrage du mondial 2006 par la Turquie, déception immense dans tout le pays à la hauteur des attentes pour les champions d’Europe. Malgré cet échec en sélection, Nikopolidis et l’Olympiakos continuent d’écraser le championnat grec.

Toujours dirigé par Rehagel, les Grecs parviennent à se qualifier pour le championnat d’Europe 2008 en Suisse et en Autriche. La Grèce est la meilleure équipe sur le plan comptable lors de la phase de qualification avec 31 points. Les tenants du titre arrivent à l’Euro avec l’ambition de refaire le même parcours qu’au Portugal 4 ans auparavant. Les Grecs ne changent pas leur philosophie, s’appuyant sur une défense très solide et priant pour marquer sur le peu d’occasions dont ils disposeront. Malheureusement, les joueurs sont plus âgés et vacillent face à des adversaires coriaces tandis que l’adresse des attaquants comme Charisteas n’est plus au rendez vous.

 

La sélection grecque à l’Euro 2008 - photo : RTBF
La sélection grecque à l’Euro 2008 – photo : RTBF

Les Grecs s’inclinent à trois reprises face à la Suède (0-2),  la Russie (0-1) puis La Roja, future vainqueur de l’épreuve (1-2). Le miracle grec ne se reproduit donc pas et les Grecs sortent par la petite porte. C’est la fin d’une génération et le divorce est consommé avec le sélectionneur allemand qui n’hésite pas à critiquer ouvertement ses joueurs.

Antonios Nikopolidis en fait les frais après la défaite face à la Russie où il commet une erreur sur le but Russe. Nikopolidis loupe sa sortie devant Semak qui n’a plus qu’à centrer pour Zirianov qui marque dans le but vide. Cette bourde élimine le tenant du titre et Otto Rehagel, en conférence de presse d’après match, déclare : « Le but ressemble plutôt à un but contre son camp de notre gardien qu’à un but russe. » et Nikopolidis annonce sa retraite internationale après la rencontre. Une fin tragique mais digne d’un héros grec tel Achille. Ainsi, Nikopolidis ne portera que les couleurs de l’Olympiakos jusqu’à sa retraite.

Dans le championnat Grec, Nikopolidis continue de faire parler de lui. En 2008, lors d’une rencontre face au PAOK Salonique, une bagarre générale éclate après une altercation entre Nikopolidis et l’ancien entraîneur du FC Nantes Sergio Conçecaio.

En janvier 2008, le portier grec fait basculer la carrière de l’un des ses meilleurs amis. En effet, Nikopolidis est le parrain du fils de Papadopoulos, Achilles. l’attaquant joue alors au Panathinaikos où il connaît une saison délicate. Lors du derby athénien, alors que le score est de un partout, le Panathinaikos obtient un penalty. Papadopoulos s’avance au point de penalty pour s’en charger. Malheureusement pour lui, Nikopolidis bien que conscient de condamner son ami, parvient à stopper le penalty . Les supporters du Pana n’hésitent alors pas à suspecter Papadopoulos d’une entente avec son ami gardien et l’attaquant des verts d’Athènes est confronté à la haine de ses propres supporters. Il n’aura d’autre choix que l’exil en Italie dans le club de Lecce. Nikopolidis déclara quelques temps plus tard au sujet de ce penalty si particulier : « J’ai ressenti à la fois du bonheur et une grande inquiétude. J’aurai pu vous prédire tout ce qui allait se passer, comment il serait traité et qu’il quitterait le club. C’est triste et injuste ».

Nikopolidis poursuit sa carrière à l’Olympiakos lors de la saison 2010/2011 et devient numéro 2 au profit du portier hongrois Balazs Megyeri. À l’issue de cette saison, Nikopolidis décide de raccrocher les crampons. Le 17 avril 2011, Nikopolidis joue son dernier match au stade Karaiskasis, l’antre de l’Olympiakos, face au Larissa FC (6-0). A quelques minutes de la fin, Nikopolidis est remplacé par Megyeri et reçoit une magnifique ovation bien méritée de la part du peuple rouge et blanc.

L’après-carrière, un entraîneur et  homme généreux

Jeune retraité , Antonio reste proche de l’Olympiakos. Il devient lors de la saison 2012-2013 adjoint de Leonardo Jardim. Le 19 janvier 2013, Leonardo Jardim est remercié et Nikopolidis nommé entraîneur intérimaire pour un bilan flatteur de 3 victoires et une défaite en 4 matchs. Michel est nommé entraîneur, la mission de Nikopolidis est terminée mais il poursuit son aventure en devenant l’adjoint de l’entraîneur ibérique. En janvier 2015, Michel quitte le club grec, Nikopolidis assure une nouvelle fois l’intérim, pour seulement une rencontre cette fois, et obtient les 3 points. Ses bonnes performances en tant qu’intérimaire tapent dans l’œil de la fédération grecque qui lui propose les rênes de l’équipe nationale U-21. En poste depuis septembre 2015, Nikopolidis a disputé 24 rencontres pour 12 victoires, 8 défaites et 4 matchs nuls.

Nikopolidis coachant l'Olympiakos lors de son intérim - photo : Youngtalents.gr
Nikopolidis coachant l’Olympiakos lors de son intérim – photo : Youngtalents.gr

Outre son activité de sélectionneur, Nikopolidis n’hésite pas à s’investir dans l’humanitaire. Depuis 2017, l’ancien gardien grec s’occupe d’une équipe de réfugiés de guerre, le Hope Refugees. Les nationalités qui composent sa formation sont multiples dans un groupe où se mêlent entre autres Afghans, Syriens et Iraquiens.

Ces joueurs, demandeurs d’asile, sont domiciliés à Athènes et s’entraînent trois fois par semaine sous les ordres de l’ancien international grec. Le dimanche, le Hope Refugees affrontent des équipes amateurs. Nikopolidis est revenu sur cette aventure chez LCI en février 2017 : « Je crois qu’ils ont déjà vu beaucoup d’améliorations dans leur quotidien, mais le principal c’est surtout que nous avons créé un groupe d’amis avec de vrais liens. Tous nos efforts sont là. »

Nikopolidis entraîneur du Hope Refugees FC, Volkskrant
Nikopolidis entraîneur du Hope Refugees FC, Volkskrant

Tel les héros grecs qui ont contribué à la mythologie de ce beau pays, Nikopolidis peut se vanter de partager des points communs avec ses aînés légendaires. Héroïque en 2004 lors de la victoire continentale, adulé par tout un peuple et généreux avec les plus démunis, la carrière de Nikopolidis est riche en événements. Peu médiatisé à l’échelle européenne, Nikopolidis n’en reste pas moins une vedette dans un pays qui connaît une période difficile tant sur le plan footballistique, que politique, social et économique. Sas efcharisto iroas ! (merci le héros, en grec).


photo de couverture : Zimbo.com

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