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30 October 2018


Les gardiens de but ont besoin d’un élément de folie” expliquait Oliver Kahn au Spiegel lors d’une interview juste avant le dernier match de sa carrière, en 2008. En effet, durant toute sa carrière le portier allemand a montré toute cette folie est bien plus qu’un simple élément.

L’Allemagne a toujours possédé des gardiens plutôt imposants et virulents avec Schumacher, Lehmann ou plus actuellement Neuer mais Oliver Kahn est le symbole de ce style de gardien allemand avec un jeu peu esthétique et très rude. Avec son mètre 88 et ses 91 kilos, ils ne sont pas nombreux à avoir pu rivaliser au duel avec celui qui fut surnommé Le Titan.

La révélation au Karlsruher SC

C’est dans le club de la ville qui l’a vu naître en 1969 qu’Oliver Kahn commence sa carrière en tant que professionnel. Le club de Karlsruhe connait bien la famille Kahn : il a vu jouer Rolf, le père d’Oliver mais aussi Axel, son grand frère. Dès son plus jeune âge, le futur gardien de la Mannschaft joue dans le club de sa ville, il débute en tant que libéro mais va très vite se retrouver dans les buts. La légende raconte que ce qui l’a motivé pour se retrouver dans la cage est de s’être vu offrir l’équipement de Sepp Maier, portier de l’équipe championne du monde de 1974.

Pas tout de suite repéré par les clubs professionnels ou les différentes sélections, il gravit peu à peu les échelons à Karlsruher passant par les équipes de jeunes puis l’équipe amateure avant d’arriver en équipe professionnelle pour la saison 1987-1988 où il est numéro 2 et ne va jouer qu’à de rares occasions sans vraiment réussir à s’imposer. Mais doter d’une grande force de caractère et d’abnégation, il ne perd pas de vue son rêve de grande carrière et travaille d’arrache pied pour se renforcer physiquement et techniquement. Grand, athlétique, il doit travailler la détente, les réflexes pour pouvoir se déplacer et plonger plus rapidement.

Il lui faudra attendre la saison de 1990-1991 pour s’imposer au sein de ce club comme titulaire indiscutable. C’est à ce moment que son talent se dévoile au grand public avec de magnifiques performances mais surtout une très bonne régularité, qualité essentielle pour gagner la confiance de son entraineur ainsi que celle de ses coéquipiers. Il gravit très vite les échelons et est à l’issue de la saison 1993-1994, il est nommé meilleur gardien de la Bundesliga et devient le portier le plus cher de l’histoire du championnat allemand à l’occasion d’un transfert record au Bayern Munich pour 2,7 millions d’euros (somme importante pour l’époque, même si elle parait dérisoire aujourd’hui). Cette saison lui vaut même un coup de fil du sélectionneur allemand : il va participer à sa première coupe du monde aux Etats-Unis derrière Illgner et Köpke.

Oliver Kahn, Gardien, Karlsruher SC
Oliver Kahn s’illustre avec le club de sa ville, le Karlsruher SC – source : Twitter

Une confirmation et une gloire retardée au Bayern Munich

Après avoir découvert une compétition européenne en club, en 1993-1994 avec la Coupe UEFA et la Coupe du monde durant l’été, Kahn arrive au Bayern Munich comme espoir du club et les supporters nourrissent légitimement de grandes attentes autour de lui. Il va pouvoir découvrir la vie dans un des plus grands clubs du monde, un club référence pour les allemands et jouer la prestigieuse Ligue des champions. Pourtant, sur un contact anodin en championnat avec un coéquipier, Oliver Kahn se rompt les ligaments croisés, coup dur pour le jeune allemand dès le début de la saison. Vrai force de la nature, il ne mettra que cinq mois à se remettre sur pied et à refouler les pelouses de Bundesliga.

Dès son retour de blessure, il retrouve les cages bavaroises pour ne plus jamais les quitter jusqu’à la fin de sa carrière en 2008. Entre temps, il va réaliser d’incroyables matchs et saisons à Munich remportant un grand nombre de titres collectifs, notamment 7 championnats allemands, la Coupe UEFA et la Ligue des champions, mais aussi individuels, en étant nommé meilleur gardien du monde en 1999 et 2001 et se classant sur le podium du ballon d’or en 2001 et 2002, performance remarquable pour un gardien.

Dans ce flot de brillants arrêts, de sorties autoritaires et rassurantes, on retient un match en particulier qui est la finale de la ligue des champions de 2001 face à Valence et Cañizares. En effet, c’est cette performance qui aurait pu lui faire gagner le ballon d’or, attribué cette saison-là à Michael Owen. Durant cette finale, Kahn repoussant les assauts de Valence un à un,  le match s’éternise et se termine aux tirs au buts. Le Titan va alors sortir 3 penalties espagnols pour propulser son équipe au sommet du football européen et faire oublier la finale perdue face à Manchester United deux ans plus tôt. Il est fort logiquement nommé homme du match et son geste de fair-play envers Cañizares, finaliste malheureux pour la deuxième année consécutive, fera le tour du monde.

Il est et restera à jamais dans l’histoire du Bayern Munich et inspirera les générations de gardiens bavarois pendant de longues années encore, à moins de se faire voler la vedette par Manuel Neuer, avec qui il partage de nombreux points communs et une admiration réciproque.

Une expérience internationale remarquée mais frustrante

Oliver Kahn va donc découvrir la Mannschaft en 1994 et intégrer la liste pour la coupe du monde, où il ne jouera pas. Ses premières minutes en équipe nationale se feront en juin 1995 à l’occasion d’un match contre la Suisse. Pourtant très en forme en club, sa route en équipe nationale est barrée par Köpke jusqu’à la retraite de ce dernier après la coupe du monde 1998. Comme souvent, Kahn va grimper les échelons très vite et se retrouver capitaine dès sa première coupe du monde en 2002, en Corée. Entre temps, il a participé à sa première grande compétition internationale avec l’Euro 2000 où l’Allemagne se fait éliminer dès les phases de poule.

Après cet échec cuisant de 2000, l’absence de quelques joueurs importants allemands notamment en défense ne permet pas à la Mannschaft d’être considérée comme une nation favorite au sacre final. Pourtant, les allemands n’encaissent qu’un seul but et Oliver Kahn est stratosphérique, déviant tous les ballons se dirigeant dans le cadre durant cette coupe du monde. En finale, tout semble bien parti pour Kahn dans sa quête de l’exploit allemand grâce à une main opposée magnifique, mais une faute de main l´obligeant à relâcher le ballon lui est fatale, Ronaldo n’en attendait pas plus. Après avoir chuté brutalement de son petit nuage, il ne peut rien faire sur une frappe de Ronaldo, encore lui, imparable. Malgré tout, Kahn est nommé meilleur joueur de ce mondial 2002 devant Ronaldo et est ainsi le premier gardien de l’histoire à recevoir cette distinction. C’est entre autre cette coupe du monde qui lui permet de monter sur le podium du ballon d’or une deuxième année consécutive, mais toujours sur la troisième marche.

À deux ans de la coupe du monde en Allemagne tant attendue par tout un peuple, se dresse l’euro 2004 en guise de dernière grande compétition internationale. Les allemands forts de leur incroyable parcours en 2002 se préparent à de grandes choses mais sont brutalement éliminés dès les phases de poule. Le sélectionneur est alors démis de ses fonctions et remplacé par Klinsmann qui va bousculer énormément cette équipe. Kahn perd le brassard au profit de Ballack et le nouveau sélectionneur instaure une véritable concurrence entre Kahn et Lehmann en vue de la prochaine coupe du monde.

C’est en avril 2006 que Klinsmann annonce avoir tranché ce débat et choisi son numéro 1. Terrible désillusion pour Oliver Kahn car le sélectionneur préfère faire confiance au gardien d’Arsenal. Mais Kahn accepte ce choix et se résout à être de nouveau la doublure en équipe nationale pour la plus belle compétition du monde à domicile. Il jouera le match pour la troisième place avant de prendre sa retraite internationale et terminera sur une victoire et une médaille de bronze en coupe du monde.

Oliver Kahn, gardien, Allemagne
Des performances incroyables mais aussi des désillusions pour Oliver Kahn avec la sélection – source : Stuttgarter Zeitung

Un personnage atypique

Durant sa carrière, Oliver Kahn ne s’est pas seulement illustré par ses performances mais aussi par une personnalité atypique, difficile à cerner et parfois effrayante. Il possédait un fort charisme qui faisait de lui un meneur d’homme naturel, raison pour laquelle il fut nommé capitaine de la sélection allemande et du Bayern Munich, et avait cette faculté énorme de motivation des troupes qui se ressentait sur le terrain. Il est clair qu’on préférait l’avoir dans son équipe.

Mais cette qualité a une contrepartie importante, car un fort caractère n’est pas toujours utilisé dans le bon sens. On l’a ainsi vu perdre ses nerfs à plusieurs reprises face à ses adversaires ou même envers ses coéquipiers, pouvant devenir dangereux, n’hésitant pas à aller au tête à tête et vociférer face à la personne qui lui avait causé du tort.

Cette attitude agressive et son physique impressionnant faisait aussi pression sur ses adversaires et cela se ressentait sur le terrain. Il pouvait gagner des duels seulement grâce à sa réputation, nombre de ses adversaires reculant, comme refusant de s’aventurer dans la surface du Titan allemand ou de sauter sur un duel seulement par crainte. Il a ainsi forger son jeu tout en puissance, mais était également capable de parades extraordinaires dans un domaine où son physique ne l’avantageait pas particulièrement, comme sa détente. Bourreau de travail, il a su corriger ces petits détails qui font la marque des grands.

 

Oliver Kahn, gardien, consultant
Oliver Kahn, retraité fait encore parlé de lui – source : Ouest-France

Aujourd’hui retraité depuis 2008, Oliver Kahn intervient encore sur les plateaux de télé, en tant que commentateur ou spécialiste, et ne manque pas de faire parler de lui. Dans son attitude toujours provocatrice et à la limite de la mégalomanie, il décrypte l’actualité des gardiens de but. Il a notamment incendié Buffon pour son transfert au PSG et s’est dit impressionné par les matches d’Hugo Lloris à la Coupe du monde. Paroles de Titan.

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Source photo : These Football Times

 

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